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Valaero - Récits & Photos

#FactAero :
Combien de systèmes faut-il pour faire fonctionner la vigie d'Orly ?

Pour son premier #FactAero, Vincent (aka @vinznojutsu) nous régale avec une explication très précise de son calcul (un peu arrangé 😉) pour arriver à la conclusion que près d’une cinquantaine de systèmes sont nécessaires au bon fonctionnement de la vigie de l’aéroport de Paris – Orly (LFPO). 

Comme le dirait Vincent : « Asseyez-vous, ça va être long ».

Pour communiquer avec les avions, il faut d’abord une radio. Oui, mais ce n’est pas si simple !

Il faut gérer les différentes positions de contrôles qui peuvent parler et il faut gérer les différentes fréquences associées au sol (GND), à la tour (TWR) ou à l’approche (APP).

Il faut également permettre aux contrôleurs de pouvoir appeler leur approche (qui n’est pas dans la vigie), les autres aéroports ou le centre en route. 
Ce qui nous fait déjà un système, ou plutôt 3 : une chaîne radio, une chaîne téléphone et une de secours.

Ensuite il faut voir les avions. Il y a les vitres de la tour et les jumelles mais je ne compte pas ça comme un système.
Il faut donc un radar. Et tant qu’à faire plein de radars. 📡📡

C’est là que les choses se compliquent…
On va d’abord aller chercher le radar pour l’approche et les avions en l’air assez lointains. 

Ce sont les gros radars (primaires ou secondaires) qui couvrent le territoire et qui mériteraient d’ailleurs un article à eux tous seuls !

Ce qui vient donc rajouter un système à notre liste. Mais en réalité non car il y a le système de détection et celui du traitement du signal pour envoyer ce qu’on appelle une « piste » ou un « plot ».
On vient donc rajouter 2 systèmes (et des gros !).

Mais autant vous dire qu’autour d’un aéroport très fréquenté comme celui d’Orly, que ce soit en l’air ou au sol, il y a vraiment beaucoup d’avions. Il faut donc d’autres types de radars.

D’abord les radars SOL : à Orly, il y en a 2 dont le célèbre posé sur le toit de la tour, qui a perdu sa mythique coiffe en 2020, montrée sur la photo ci-contre. 2 radars = 2 systèmes.

Enfin, le système ADS-B récupère les « plots » envoyés par les avions eux-mêmes mais aussi tous les véhicules de la plateforme. C’est un système DSNA qui s’appuie sur les données envoyés par les avions et sur un système ADP pour les véhicules. On ajoute donc trois nouveaux systèmes à la liste !

Maintenant, il faut afficher tous ces « plots ». Mais pas seulement, malheureux !

Il faut recevoir toutes ces pistes et surtout analyser les signaux reçus. Ensuite, il faut les fusionner. On appelle donc en toute logique ces deux phases la « poursuite » et la « fusion ».

Toutes ces phases nécessitent un long, exigeant et minutieux travail de la part de nos ATSEP pour régler le tout. Et tout se fait sur une visu SOL et une visu AIR. Ce qui vient rajouter 2 systèmes différents et donc deux écrans radars.

Voilà, on a enfin des plots. Maintenant il faut les corréler. On entre donc dans le monde merveilleux du PLAN DE VOL ! Et là, les amis on parle d’un système bien complexe qu’on surveille comme le lait sur le feu !

Là aussi, il y aurait tellement de choses à dire sur ce système qui date du début des années 90 qu’un article serait nécessaire 👀

La bonne nouvelle, c’est qu’on va compter le tout pour un système.

Nous voilà arrivés à 13 systèmes. C’est déjà pas mal, mais pour permettre une capacité d’au moins 1 avion toutes les 2 minutes, il va nous falloir un tout petit peu plus.

Un gros morceau nécessaire au contrôle d’une plateforme où la quasi-totalité des avions évolue en IFR et aux procédures, c’est l’information générale !

À Paris, il faut d’abord que les plateformes très proches les unes des autres que sont Orly, le Bourget et Charles de Gaulle puissent se parler.
Et quand je dis « se parler », je veux dire communiquer entre systèmes.

Le système d’Orly va communiquer à celui de ses 2 voisins pour échanger les informations de l’ATIS : la lettre de chacun d’entre eux mais aussi la configuration des pistes en services et le niveau de transition.
Hop, trois nouveaux systèmes !

Et n’oublions pas l’ACC qui a également besoin de la configuration d’Orly et du niveau de transition.
Au passage, parce qu’on le vaut bien, rajoutons un système qui partage tous les NOTAMS possibles et imaginables. Nous voilà équipés de deux nouveaux systèmes !

Toujours à propos de l’ATIS, un système dédié permet l’envoi par datalink aux avions.

Je ne m’étends pas sur l’architecture tordue de ce système mais vulgarisons le en disant que les flux transitent par toute la France entre la Tour et l’avion parfois au parking à quelques mètres. Un nouveau système.

Évidemment, pour construire ces ATIS et pour contrôler finement dans la zone de la vigie, il faut les données météo.
Un 1er système transmet alors tous les METAR, TAF, MAA et SPECI des terrains français.

Il faudra cependant présenter d’abord ceux qui intéressent directement la vigie mais certains avions sont susceptibles de demander n’importe quelle météo et il faudra pouvoir la leur donner. Au passage on y accole un système de transmission de ces messages. Ne cherchez pas, c’est historique.

Ensuite, on doit donner accès à toutes les données météo précises des capteurs de la plateforme.
Et comme ces informations là sont quand même hyper indispensables, on se met un système de secours sous la main.

Un cisaillement de vent, ça peut piquer quand on revient des Antilles après 8 heures de vol et qu’on tombe sur la météo parisienne. On rajoute donc deux nouveaux systèmes et on se retrouve comme par magie à 23 !

Rajoutons maintenant toute la gestion partagée entre ADP et la DSNA du balisage, de l’ILS, de certains capteurs et de l’état de tout ce que l’on trouve sur la plateforme.
J’ai personnellement renoncé à comprendre comment on en est arrivé là mais je sais que c’est compliqué.

Il y a notamment un système (cher à @ClementGrenier) qui permet l’activation – depuis la vigie – du balisage des barres d’arrêt.

Je reste volontairement discret sur les nouveaux systèmes mais il y a là des alertes intéressantes à mettre en place avec ce système.

On fait un énorme bond de 7 systèmes !

Revenons en vigie. L’organisme d’Orly, avec toutes ces données météo, crée donc son ATIS. Et ça, c’est un (vieux) système à part entière.

Un autre vieux système rigolo qui reste en tour, c’est un petit écran incrusté dans le meuble de contrôle et qui permet de visualiser l’occupation d’une piste, histoire de ne pas oublier, par exemple, une déneigeuse ou un flyco qui traînerait malencontreusement par là-bas.

Promis, on a prévu de les changer pour quelque chose qui ressemblerait plus à ça… ⬇️

Parlons maintenant de 2 gros systèmes qui n’ont pas un impact direct sur la sécurité mais qui sont essentiels pour assurer les capa qu’on a aujourd’hui (ou tout du moins hier avant le COVID) : le management des flux départs & arrivées.

Ce sont deux systèmes très différents qui, eux aussi, mériteraient un fil à part entière.
Coordonnés au niveau européen, ils permettent de se projeter sur la charge de travail. 2 nouveaux systèmes.

Il y a une sacrée tambouille interne à la tour pour gérer les positions. Rappelons qu’à Orly, comme ailleurs, il y a plein de configurations différentes selon l’heure, le trafic ou d’autres contraintes.
Pour permettre d’avoir les bons systèmes présentés aux bons contrôleurs (oui, je sais, ils sont tous bons), on a une série de systèmes qui va gérer ça, dont certains sont pilotés par le chef de tour. On va donc ajouter quatre nouveaux systèmes, sans les détailler.

Un petit mot sur l’imprimante de strip. En elle-même c’est juste… ben, une imprimante. Mais envoyer au contrôleur sur la bonne position, le bon strip avion, au bon moment sachez simplement que c’est l’enfer de l’ingénieur système !

Et si on échangeait des données avec le gestionnaire d’aéroport ?! Vous pensez sûrement que ce serait utile. Ça l’est, bien sûr et c’est pourquoi on a deux systèmes importants en interface avec ADP.

Le premier, lui-même connecté au network manager Eurocontrol (2 systèmes en plus, c’est cadeau) permet d’affiner la gestion des flux et notamment la donnée qui compte le plus pour les pilotes : la TSAT. Du coup +4.

Le second permet la gestion des tractés.
Parce que oui, déplacer un avion d’un poste à un autre, ça mérite bien 2 systèmes à part entière… 
Un pour faire l’interface et l’autre coté ADP eux-mêmes. +2

On commence à être pas mal maintenant. Notre compteur est à 46 systèmes ! 😱

On va maintenant ajouter un système complexe à base de calculateurs qui permet la gestion des alertes de séparations ainsi qu’un petit système, très simple et très vieux mais essentiel et sans qui rien de tout ça ne marcherait bien : la synchronisation temporelle des machines ! +2

Enfin, je triche un peu pour retomber sur mes pattes mais je rajoute un dernier GROS système, en fait lui-même composé de nombreux sous-systèmes : la gestion technique de tout ce plat de nouille.

Il est géré par le service technique et les ATSEP. Il me faudrait un autre article aussi long que celui-ci pour détailler les installations, la gestion des machines, la supervision, l’enregistrement (légal notamment)…

Et voilà on est à 49 systèmes pour faire marcher une tour comme celle d’Orly ! Merci aux courageux qui sont arrivés à la fin de cet article. #LFPOforever #MOGA

PS : j’ai aussi zappé le bureau de piste, les systèmes qui permettent de nous faire payer, des petits systèmes qui ont 70 ans mais qui restent parce que bon, des systèmes pour les bureaux des chefs pour faire style etc… Mais si je les comptais, ça faisait plus que 49 ! 🤪

Et voilà, il s’agit du premier #FactAero converti en article.

Un énorme merci à Vincent pour la réalisation de ce Fact très instructif sur les systèmes des tours de contrôle.
En espérant que vous vous couchiez moins bête ! 😉

Ci-contre, Vincent posant avec la magnifique tour d’Orly.